INDICES
   

Voici l’une des dernières espèces minérales de taille imposante découvertes (dans les années ’80). En effet, Si l’on découvre une à deux douzaines d’espèces minérales différentes chaque année, elles sont très souvent millimétriques, submillimétriques et même « microniques ».

Les cristaux de ce minéral sont bien formés, souvent idiomorphes et leur teinte chaude présente un beau lustre.

Si ce minéral n’a pas connu une grande diffusion, cela est dû à ce qu’il n’a été trouvé que dans sa localité-type et seulement dans cinq poches.

 

La localité d’origine est comme souvent dans ce jeu, un très grand lieu classique.  

 

REPONSE

NOM : Sturmanite

Formule :   Ca6 (Fe3+,Al,Mn2+)2 (SO4)2 [B(OH)4] (OH)12 . 25 H2O. 

La sturmanite est apparentée au groupe de l’ettringite. Ce sont des sulfates de formule générale

Ca6X2Y(O,OH)12 . 26 H2O

Avec X = Al, Cr3+, Fe3+, Mn2+, Si ; Y = (SO4, CO3)3 ou (SO4)2B(OH)4.

La thaumasite appartient aussi à ce groupe.

 

MORPHOLOGIE

L’échantillon holotype de sturmanite se présente sous la forme de cristaux transparents euhédraux jaunes implantés sur un minerai d’hématite opaque. Ce sont des dipyramides hexagonales, tabulaires sur la face {00.1}, avec un rapport largeur sur hauteur d’environ 3 :1. L’aspect général est ainsi un disque facetté.

Les formes modifiant l’échantillon holotype sont la dipyramide {10.4} prépondérante, avec une légère influence de la dipyramide {11.4} sous l’aspect de petites troncatures. Ces faces présentent un même lustre vitreux  

La lecture de ces quelques lignes souligne la très grande différence entre l’holotype et les échantillons de sturmanite qui sont apparus sur le marché durant les années ’80. Ceux-ci étaient beaucoup plus développés, atteignant souvent 2 cm de largeur sur 1 cm de hauteur. En plus, ces cristaux exhibaient la présence de la forme {10.0} conférant à l’espèce l’allure de prismes hexagonaux courts biterminés par la dipyramide {10.4}. Assez souvent aussi, la base {00.1} est présente.

Ces prismes présentent fréquemment des échancrures perpendiculaires à l’élongation, soulignant une croissance oscillatoire du cristal, avec de courtes ébauches de la terminaison bipyramidale. Ce phénomène est à l’origine de la création de prismes pouvant dépasser 10 cm sur 3 cm d’épaisseur. Cet aspect de la sturmanite s’écarte ainsi fortement des cristaux millimétriques constituant l’holotype. De plus, la teinte des cristaux est plus ambrée sans être brun sombre (disons couleur des cations ferriques). Des zones jaunes, plus claires peuvent être présentes. Ces derniers gros cristaux proviennent de la mine Schwaning II, alors qu’il semble bien que l’holotype, millimétrique, soit originaire de la mine Wessels.  

 

Bien que ce fait ne soit pas signalé dans la littérature, conservée en collection dans des conditions médiocres, la sturmanite pourrait subir une évolution en perdant son beau lustre initial, liée sans doute à une déshydratation partielle.

 

CRISTALLOGRAPHIE

 

Système rhomboédrique, groupe spatial P31c, groupe ponctuel 3m, classe trigonale antihémièdre.

a = 11,16  c = 21,79 Å               Z = 2                a:c = 1 : 1.953

Les auteurs ont décrit la morphologie apparente du cristal selon l’approximation d’appartenance au système hexagonal (6mm). Cette plus haute symétrie apparente pourrait être due, tout comme pour l’ettringite, soit à des macles, soit à un désordre dans la maille élémentaire.

Clivage parfait parallèle à la face du prisme {10.0}. Fragile, son trait est jaune. Lustre vitreux sur les surfaces de clivage et vitreux à légèrement gras sur les surfaces de fractures.

Dureté = 2,5. Densité (calc.) = 1,855 g/cm3. Pas de fluorescence.

Dichroïque (vert pâle et vert jaune pâle) et non fluorescente.

La sturmanite est rapidement solubilisée par HCl dilué et froid.

 

STRUCTURE

 

La sturmanite est isostructurale de l’ettringite. Cette dernière est constituée de colonnes (parallèles à l’axe c) de cations Al octaédriques coordinés à des OH, alternant avec des groupes de 3 cations Ca coordinés par 4 OH et 4 H2O. Ces colonnes répondent à la composition Ca6 [Al(OH)6]2 . 24 H2O.

Les cations Ca (coordination 8) peuvent être substitués par d’autres ions, comme Pb2+. Les cations Al octaédriques peuvent aussi être substitués par Fe, Mn, etc.

Les canaux séparant les colonnes sont occupés par les anions (SO4)2- et (CO3)2-ou par 2 H2O. Il existe 4 sites anioniques pour 6 Ca, avec plusieurs possibilités d’occupations différentes. On est ainsi amené à envisager la notion de superstructure pour caractériser l’édifice cristallin de l’ettringite.

La sturmanite est l’analogue Fe3+ et B de l’ettringite. Les sites octaédriques sont occupés principalement par les cations Fe3+, mais aussi par Al et Mn. Les groupes (SO4)2- subissent également une substitution par les anions boriques B(OH)4 (B en coordination tétraédrique). L’eau totale est inférieure aux 26 H2O de la formule idéalisée, dans laquelle 24 H2O se trouvent dans les colonnes et deux autres H2O dans les canaux interstitiels. Il y aurait un excès de (SO4) et B(OH)4 dans ces canaux, compensant la déficience en eau. Il faut aussi savoir que la détermination de cette teneur en eau reste difficile pour des minéraux aussi hydratés.

 

CONCLUSION

 

Voilà ainsi présentée une espèce rare, provenant de cette zone si riche en manganèse, les « Managanese Fields » de la région d’Hotazel (Afrique du Sud). Sans la perspicacité de l’éminent Dr. Richard Venable GAINES, les minuscules cristaux de l’holotype de la sturmanite auraient été encore longtemps confondus avec soit l’ettringite, présente sur le site. 

Roger WARIN