KAPOETA HOW





Lame mince de Kapoeta HOW 
présentant trois lithologies. © R. Warin.



GENERALITES



La chute de cette achondrite a été observée dans le Sud Soudan (31° 10'S, 127° 45’E) le 22 avril 1942. TKW : 11,36 kg. Trouvée sur la route Kapoeta – Nathalani, la masse principale se trouve au Sudan Geological Survey à Khartoum.

Les howardites sont des brèches polymictes qui sont en fait des mélanges d’eucrites et de diogénites. Ces roches ont été regroupées sous le vocable achondrites HED. Leur origine est attribuée à l’astéroïde 4 Vesta.
Les minéraux principaux des howardites sont les pyroxènes (surtout des ortho-pyroxènes) et des plagioclases pauvres en Na.
Kapoeta appartient à une minorité d’howardites qui sont riches en gaz nobles issus du vent solaire. Elle est donc classée comme brèche régolithique. Kapoeta contient aussi des abondances en éléments sidérophiles (particulièrement riches en Ir). Les clastes de verres sont nombreux ainsi que des inclusions xénolithiques de fragments de chondrite carbonée et des microclastes de fragments carbonés CM. Leur origine se trouve sans doute dans des additions tardives au régolite. Elle contient même des gaz planétaires en plus des gaz du vent solaire (Cartwright et al., 2011).



Fig. 2 - Kapoeta – une première lithologie faite de cristaux aciculaires de pyroxènes. © R.Warin.



DESCRIPTION



Dans cette lame mince de Kapoeta, 3 lithologies sont exceptionnellement présentes sur une si petite surface (1 à 2 cm²): 
l’une est constituée de cristaux aciculaires de pyroxènes (Fig. 1, 2), 
la seconde possède les caractéristiques d’une howardite (Fig. 3) et 
la 3e est vue comme un « impact melt » (fondu d’impact) dont on aperçoit la veine du flux (Fig. 1, 4). 



Fig. 3 - Kapoeta HOW – Lithologie d’howardite. © R. Warin.



Situé au centre de la photo (Fig. 1), ce claste a un profil d’entonnoir sombre. Formé de matériau diogénétique, il a été fortement choqué. Il devait provenir du fond du cratère d’impact. La matrice y est si finement grainée qu'elle disperse la lumière et apparaît en noir en polarisation croisée. Cette matrice contient quelques grains de pyroxène alignés indiquant un écoulement passé. Ces petits phénocristaux ont recristallisé dans ce claste fondu. La viscosité du liquide (un verre) a conservé leur orientation dans le flux et n’a pas favorisé leur croissance.
Le reste de la lame mince est une howardite typique, c’est-à-dire un mélange de matériaux diogénitiques et eucritiques (Fig. 3) avec en outre la présence du claste constitué de cristaux aciculaires, d’origine diogénétique également (lithologie aciculaire – Fig. 1, 5, 6).




Fig 4. - Kapoeta HOW – Impact Melt issu d’un matériau diogénétique,
une troisième lithologie dans cette lame, avec de petits phénocristaux orientés 
par le flux immergés dans une matrice vitreuse. © R.Warin.



En fait, l’impacteur a frappé un régolite compacté du corps parent supposé, Vesta, et il a éjecté cette howardite complexe. Les scientifiques ont conclu que c’était une micro-brèche incluse dans une brèche. Ils ont poussé le raffinement jusqu’à dater divers clastes inclus, arrivant à la conclusion que leurs âges étaient différents. 
On sait que Vesta a été souvent percutée par des corps. L’un de ces chocs a même creusé un immense cratère dont le diamètre avoisine celui de l’astéroïde. Des remblais de débris bordent en surface les cratères, mélangeant les lithologies eucritiques et diogénitiques.
Ces débris superficiels ont subi des rayonnements intenses et des bombardements venus de l’espace et ils ont formé un régolite comme sur la Lune. Les analyses de ce régolite ont montré sa complexité : il contient des gaz nobles du vent solaire et même des gaz d’origine planétaire, des fragments de roches ignées diogénétiques intrusives, et des laves basaltiques extrusives de nature eucritique. C’est le sol d’un astéroïde sans atmosphère.




Fig. 5 - Kapoeta– Claste de cristaux aciculaires de pyroxènes serti 
entre des parties d’howardite (LPA). © R. Warin.




Fig. 6 – Kapoeta – Plage identique observée en lumière polarisée. 
© R. Warin.



Quand un météoride impacte cette zone de débris, transformée en régolite compacté, des howardites sont expulsées.
Dans ce cas, l’impact a peut-être aussi provoqué la formation d’un impact melt (si celui-ci n’était pas présent antérieurement). Les veines de flux solidifiées subsistent.
Les cristaux aciculaires (à gauche sur fig. 1) sont des pyroxènes plongés dans une matrice microcristalline (Fig. 2, 5, 6) qui obscurcit même ces cristaux. L’observation sous lumière polarisée croisée (LPA) et sous lumière simplement polarisée accentue les contrastes des phases (Fig. 5, 6).






Fig. 7 – Kapoeta – Vue typique d’howardite, avec d’un gros grain 
d’ortho- pyroxène ayant subi une ex-solution d’augite. © R. Warin.



Le matériau diogénétique montre des grains de pyroxènes qui se sont formés à grande profondeur comme l’attestent les recristallisations lentes accompagnées de processus d’ex-solutions (d’augite). Ce sont ces multiples lamelles de teintes différentes qui divisent certains grains cristallins, sans être des macles.

Quelques autres photos illustrent la beauté des diverses lithologies des howardites. Du zoning apparaît dans un même grain soulignant les variations fréquentes de composition chimique. Ainsi pour fixer les idées, les pyroxènes peuvent s’inscrire dans la formule suivante :
Wo(1-35)En(33-80)Fs(18-53). Les teneurs en calcium et en fer peuvent donc varier beaucoup. La composition des feldspaths (plagioclases) eucritiques est : An(95). On constate l’importance relative du calcium dans ces roches (et les ex-solutions qui peuvent en résulter lors d’un lent refroidissement).





Fig. 8 – Kapoeta – Les lignes parallèles correspondent à des ex-solutions 
d’augite dans un autre pyroxène. © R. Warin.




Fig. 9 – Kapoeta – Vue très grossie de la plage précédente. © R. Warin.

 




Fig. 10 – Kapoeta – Gros grain automorphe de pyroxene matériau diogénétique) entouré 
de grains plus petits d’origine eucritique. © R. Warin.



CONCLUSION



Etant donné leur origine, il n’est pas étonnant que les howardites soient des brèches polymictes. De gros grains d’orthopyroxènes d’origine diogénétique aux dimensions très variées attirent l’attention. Ils sont entourés de grains roulés plus petits dont l’origine est eucritique, principal constituant de la matrice. Les eucrites ressemblent assez bien aux basaltes terrestres avec comme constituants des clinopyroxènes (pigeonite et augite) et des feldspaths (plagioclases).

Cette lame mince est d’autant plus intéressante qu’une troisième lithologie s’ajoute aux deux premières, un impact melt d’origine diogénétique avec une veine de flux, contenant quelques petits cristaux orientés de pyroxènes.

Références :

http://www.meteoritestudies.com/protected_KAPOETA.HTM (David Weir)
The Cambridge Encyclopedia of Meteorites, O. Richard Norton (2002).
John Kashuba, Meteorite Times, October 2007.