IBITIRA EUC ungr.

 



Fig. 1 – Vue en lumière polarisée croisée (LPA) d’une lame mince
(0,030 mm) de Ibitira EUC mmict. Deux sortes de composants se discernent bien, les pyroxènes et les plagioclases. 
© R.Warin.

Cette achondrite est tombée le 30 juin 1957 à 17 :15 h. Une pierre de 2.5 kg fut retrouvée dans le village d’Ibitira, près de Martinho Campos, Minas Gerais, Brésil.



Ibitira est une eucrite non groupée de type basaltique. Ce n’est pas une brèche, mais bien une achondrite basaltique vésiculaire (3 %vol.). La cristallisation s’est produite sous une pression suffisamment faible pour permettre la formation de vésicules, si nombreuses dans cette achondrite.
Sa structure granoblastique indique que ses minéraux sont imbriqués telles les pièces d'un puzzle. Cette roche est issue d'un métamorphisme de haute pression. 
Les pyroxènes sont les principaux constituants (60%vol.), sous la forme de pigeonite. Les plagioclases riches en calcium (30%vol.) et la tridymite (5%vol.) complètent la composition.
Les phases mineures sont les écailles de Fe-Ni, la troilite, l’ilménite, la chromite.
L’âge de cristallisation de cette roche ignée atteint 4,556 Ma selon plusieurs radiochronomètres. 

Des analyses pétrologiques poussées (D. Mittlefehldt – 2005) ont montré que cette eucrite n’avait pas comme origine Vesta, mais bien un autre corps-parent différencié (comme Pasamonte EUC).
Le terme « eucrite » a été conservé et étendu à toutes les météorites basaltiques possédant cette composition. 
En conclusion, Ibitira est une eucrite n’appartenant pas à la classe des HED originaires de Vesta. Elle reste non groupée

.



Fig. 2 – Autre vue générale d’Ibitira EUC. Présence de grains de pyroxènes et 
de masses plus ou moins effilées de plagioclages.
LPA - Largeur du champ = 1.25 mm © R. Warin





Fig. 3 – Même vue en lumière transmise non croisée LP.
Présence dans les opaques de grains de pyroxène en extinction dans la vue précédente. © R. Warin.


PETROLOGIE


Cette roche est une mosaïque de grains petits à moyens de pyroxènes, enfermant des masses de lames plus ou moins étirées de plagioclases. 
Le plagioclase est zoné, indiquant des variations de compositions.
Pyroxènes: la pigeonite (non zonée) a subi une exsolution d'augite. 
Les zones opaques correspondent soit à des grains de pyroxènes en extinction, soit à des sulfures ou des écailles métalliques, soit à des trous (vésicules) remplis de baume lors de la préparation de la lame.
Les teintes zonées gris clair et foncé (extinction ondulante) des cristaux de plagioclase sont dues à un choc important, qui toutefois n’a pas affecté les pyroxènes (Fig. 4). 





Fig. 4 – Cristal étiré de plagioclase (gris) surmonté d’un grain (vert) 
du pyroxène dominant, la pigeonite, ayant subi un processus d’exsolution d’ions Ca2+. Champ = 0.3 mm. LPA. © R. Warin.



La pigeonite est la phase stable des pyroxènes monocliniques à haute température. Lors du refroidissement, la pigeonite ne tolère plus autant de Ca2+ dans son réseau. Ces cations sont alors expulsés par diffusion et forment une nouvelle phase, l’augite, plus riche en Ca2+. Après un premier stade de diffusion, la pigeonite se maintient à un nouvel état d’équilibre métastable, puis l’exsolution reprend. Le cycle est répété de nombreuses fois, formant ces stries ou bandes parallèles de ces minéraux incompatibles : pigeonite et augite. Un métamorphisme de longue durée est nécessaire pour produire un tel processus d’exsolution bien marqué. C’est aussi ce recuit prolongé qui a affecté les plagioclases.

Le grain de pyroxène, teinté de vert sur la photo (Fig. 4) en polarisation croisée, a aussi subi un autre phénomène, il s’est maclé quelques fois selon la loi de macle multiple suivant le plan (100). Il en résulte une belle texture en chevron, chaque individu du plan de macle étant édifié sur un réseau commun.

Quand de telles textures d’exsolutions se forment, on parle de pyroxènes inversés.





Fig. 5 – Bel exemple de grain de pigeonite montrant les lamelles d’exsolution d’augite. Champ = 0.3 mm. LPA. © R. Warin.



Fig. 6 – Joli tableau (fortement grossi). Champ = 0.3 mm.
Extrémités de lattes de plagioclases (en gris) sertissant des grains de pyroxènes et des opaques. Champ = 0.3 mm. LPA. © R. Warin.

 



Fig. 7 – Grain de pigeonite résumant tous les processus subis lors du refroidissement lent. Champ = 0.6 mm. LPA. © R. Warin.

 



Fig. 8 -Même figure que la précédente, 
avec des annotations. © R. Warin.

En plus des nombreuses lamelles d’exsolutions présentes, plusieurs inclusions poecillitiques (d’olivine par exemple) persillent ce grain de pigeonite.

La pigeonite (monoclinique) montre deux clivages dont les traces seront presque orthogonales si la coupe est perpendiculaire à l’axe c. Mais dans le cas d’une section faite parallèlement à l’axe c, ou à la zone mm (hk0), les deux clivages se confondent en une seule direction. C’est le cas du grain de la figure (7), qui sont assez discrètes dans ce cas.

En d’autres mots, la section transversale d'un cristal automorphe présentera un fin quadrillage des clivages m {110}, tandis que la coupe parallèle à la zone mm (hk0) parallèle à l'axe c ne montre qu’une trace unique pour les deux clivages.
C'est donc ce type de section parallèle que l’on trouve sur le cristal ci-dessus (Fig. 7).



Fig. 9 – Dessin théorique d’un cristal de pigeonite. © R.W.



Un schéma théorique (Fig. 9) d’un cristal de pigeonite facilitera la compréhension des placements des faces. La pigeonite terrestre est très abondante (l’un des principaux constituants du manteau), mais ses cristaux automorphes (isolés) sont très rares.

Roger WARIN.